300 de Zack Snyder

Je vais ranimer un peu la flamme de ce blog en perdition, et faire une petite pause dans cette période opéra. Je ferai quelques comptes rendus des spectacles que j’ai vu : La Juive de Halevy, Alcina de Haendel, Katerina Ismaïlova de Chostakovich, Jenufa de Janacek et enfin Ariodante de Haendel. Que de l’opéra. Donc pause !


Ca c'est David.

Mais grâce à l’affreuse bande de geeks que je fréquente j’ai assisté mercredi dernier à une avant-première public de 300 de Zack Snyder. J’avais regardé d’un œil torve les différences bandes annonces et autres 300 secondes de 300 diffusés abondamment sur Internet et j’avais été amusé par l’esthétique qui semblait annoncée : des poses hiératiques de culturistes vêtus seulement d’un gros rideau rouge et du slip de tarzan, qui regardaient l’horizon d’un regard froid derrière leur casque spartiate.

Y avait un côté affiche de recrutement dans la division Charlemagne qui m’avait fait soupçonner un petit bijou, et j’avais donc acheté ma place avec confiance.

Il s’agit de l’adaptation d’une BD de Franck Miller (Sin City) sur les 300 spartiates menés par Leonidas, morts pour défendre un défilé face à l’armée perse de Xerxes en immense supériorité numérique. Je ne connaissais pas la BD, mais l’idée est que tout est filmé en fond bleu avec un grand travail graphique pour ramener aux images de Franck Miller, très contrastées clair/sombre.

Alors ? Alors ?

Un chef d’œuvre absolu qui fera de ce film un sommet de l’histoire du 7ème art.

Dès les premières minutes d'un champ de blé infini éclairé par le soleil à l'horizon, un grand sourire est apparu sur mon visage, et, assommé par la musique martialement pompeuse d’un certain Tyler Bates, je me suis immergé en plein plaisir nanardesque. Bon tout le film est au ralenti, quoique non. Seules les scènes de bataille sont au ralenti, et il n'y a que des scènes de batailles. En réalité non, c'est faux, elles sont espacées par des scènes où les acteurs sont statiques pour sortir quelques phrases sentencieuses avec des voix artificiellement distordues vers le grave. Miam ! Cela dit, je crois que le film passé en durée normale durerait environ 20 minutes contre les 117 annoncées. Ce serait ptet pas mal car je dois reconnaître que je regardais un peu ma montre sur la fin.


Ca c'est Zak.

Thermopyles ça veut dire « Portes chaudes », et en effet, c’est chaud ! Les Perses, au cas où vous l’ignoriez, ont inventé la parade de la gay pride et c’est donc une caravane de lesbiennes en chaleur, de drag queens recouvertes de piercings chevauchant des éléphants habillés d’or menés par cette grande folle de Xerxes qui se prépare à envahir la Grèce. Ils ont même un gros géant chauve pas content.

Mais ce que les Perses ignorent, c’est que les grecs sont bien mieux équipés qu’eux en clubs de fitness – ça se voit au premier coup d’œil- et que sur le front arrière, les femmes spartiates vertueuses font de grands discours sur la liberté et la défense de la Patrie : l’arrière tiendra. Et cela malgré la traitrise d’infâmes politiciens véreux qui ne souhaitent que l’échec des purs guerriers partis au front.

J’ai adoré le résultat qui marque la naissance d’une nouvelle esthétique kitsch. Alors que d’après les quelques images que j’en ai vu les péplums qu’étaient Alexandre et Troie restaient dans le style péplum kitsch flamboyant des années 50, il y a ici du nouveau. Un savant mélange de cette esthétique traditionnelle pour les costumes et de jeu vidéo pour la façon de filmer, caméra rotative autour de la scène de bataille elle-même très figée dans sa reproduction des images de la BD de Miller.

Je tiens d’ailleurs à marquer ici mon désaccord sur un point : ceux qui prétendent que cela rappelle Leni Riefenstahl sont insultants pour elle, qui a toujours gardé une classe et une élégance certaine dans son iconographie, non mais c’est vrai à la fin, faut arréter de dire n'importe quoi.


Ca c'est Leni.

Sur le fond, c’est le Triomphe de la Volonté. Malgré l’échec militaire annoncé par une danseuse topless (l’oracle pour les incultes) qui fraie avec des vieillards affectés de prothèses en matière plastique sur le visage, Leonidas sait qu’il peut vaincre avec ses 299 camarades. D’ailleurs que quand il était petit il a pété la gueule à la Bête du Gévaudan dans la neige, et que donc rien ne peut l’arrêter. Même pas ce dégénéré infirme de Éphialtès qui a piqué son costume de fourbe à Quasimodo.

L’épopée de Leonidas vers la gloire sera commentée par une voix off qui sort de temps en temps une phrase ampoulée super grâve. L’origine de cette voix divise au passage les historiens, certains pensent qu’il s’agirait de Zeus qui avait encore trop forcé sur l’ouzo à cause de cette salope d’Hera, quand d’autres penchent plutôt pour un texte d’Hérodote qui jouait malheureusement avec le débilitron sur Internet ce soir là Le Debilitron

Ce film renferme pour moi toutes les promesses pour trôner dans l’Olympe des nanars quand son esthétique dernier cri aura passé et que sa nullité apparaîtra au grand jour. A garder sous le coude, donc, il devrait se bonifier nanardesquement avec le temps.


Ca c'est Franck

Commentaires

Anonyme a dit…
D’ailleurs que quand il était petit il a pété la gueule à la Bête du Gévaudan dans la neige, et que donc rien ne peut l’arrêter.

On voit là toute l'étendue de ta science nanardesque, du genre "Dracula et Rocky contre Faust". Je ne serais pas surpris que ta thèse ait porté sur le droit moral appliqué aux nanars garantis.

Merci pour ce petit moment de fraîcheur. Ca fait envie. :)
Anonyme a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
Fanch a dit…
message supprimé au dessus pour cause de doublon, c'est dommage qu'il ne soit pas totalement supprimé, comme ça on a l'impression qu'il y a de la censure sur ce blog. Tant pis.

Ma science nanardesque est assez limitée malheuseusement. Des merveilles sur ce site pour ceux qui l'ignorent encore : http://www.nanarland.com/

Une mine d'idée de films à voir :)

Le statut nanaredesque de 300 sera discuté, un rapide tour sur Internet m'a montré qu'on parle plus de chef d'oeuvre du film d'action.

A vrai dire, j'en suis arrivé à me demander ce qui m'arrive. Je suis d'habitude un farouche ennemi des procès d'intention et des lectures politiques de films qui n'ont rien à voir avec le sujet, et je comprends tous ceux qui disent que c'est être à côté de la plaque, que je surinterprète un film, ou que j'y plaque des préjugés.

Mais dans ce cas, il me semble qu'il y a un réel malaise.

Sur l'esthétique, qui n'est pas si fidèle qu'on le dit au graphisme de Miller, qui me paraît plus sobre, je comprends que l'on puisse trouver ça magnifique. Il y a quand même beaucoup d'esbrouffe et d'épate dans ces images, et la scène de l'oracle fait penser à une pub pour du parfum, mais bon...

C'est le fond qui est étrange. Le sujet est en soi délicat. Les Spartiates sont un sujet qui peut déraper et je ne vois ici aucune distanciation. Eugénisme et militarisme, civilisation pré-chrétienne qui fait partie de la "naissance de l'occident", poésie grecque archaïque et amorale, les Spartiates ont beaucoup inspiré les nazis en leur temps.

En voyant une bande annonce, je me suis rappelle d'un documentaire que j'avais vu sur la poche de Saint Nazaire, défendue par une compagnie de SS qui avait tenu du 4 août 1944 jusqu'au 11 mai 1945 contre les alliés (Berlin tombe le 7 mai 1945). Les textes retrouvés après la bataille, écrits par les officiers SS, montraient que tout le monde avait pété un fusible dans le blockhaus et qu'ils se voyaient vraiment comme la réincarnation de Leonidas et sa compagnie. Comme pour la bataille des Thermopyles on parlerait encore d'eux dans des millénaires (ils ont presque réussi, je réussis à en parler sur ce fichu blog ^^). Quelqu'un pour faire un film hagiographique ?

Mais que l'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, les Spartiates ne sont pas d'extrème droite "en soi", pas d'anachronisme ou de relecture de l'histoire par des critères moraux actuels, de même que Jeanne d'Arc n'a jamais eu sa carte du Front National et pourrait aussi bien être un symbole féministe ou social.

Mais quoi qu'il en soit, je n'arrive pas à croire à la naïveté et à la candeur de Franck Miller ou Zak Snyder. Car c'est le traitement du sujet qui est le plus douteux.

Les Perses sont montrés comme une bande de dégénérés corrompus, d'une autre civilisation, les "étrangers". Aucune noblesse dans leurs actes, ils sont lâches, fourbes, avachis dans les plaisirs.
Le personnage de Xerxes est un modèle de délire.

On va me dire que cette description rejoint la façon dont les historiens grecs ont raconté cette histoire. C'est possible, mais est-ce qu'on est obligé de reprendre en 2007 les préventions des grecs contre cette civilisation qui leur échappait, cet empire administratif multi-culturel qui leur semblait si disproportionné et mystérieux ? Ici c'est poussé jusqu'à la caricature, aucune nuance n'est portée. Alors on va me dire que justement c'est cela qui est drôle, que c'est un film défouloir. Oui, c'est vrai, avec les homosexuels du côté des mauvais, les étrangers du côté des mauvais, les politiques du côté des mauvais.

Dans le même temps, les bons sont les guerriers, purs et droits, tous très blancs. Il sont trahis par Ephialtes qui est montré comme un être difforme qui a échappé par erreur à l'eugénisme spartiate. Difforme donc traître.

Je ne pense pas, comme cela a été dit, que ce film ait un quelconque rapport avec la guerre en Irak ou des projets militaires vers l'Iran (où il semble provoquer un grand émoi), si on excepte le discours de la femme de Leonidas, très attachée à la défense de la Patrie contre l'agression, et qui conclut que la liberté à un prix. Mais bon.

Je trouve aussi que la mode du dénigrement systématique de l'Occident est fatiguante et empêche trop souvent de dire ce que l'on pense sur bien des sujets, mettant en place des échelles de valeurs morales à géométrie variable, il n'empêche que ce film accumule esthétiquement et scénaristiquement un ensemble de maladresses. Et comme je l'ai dit, je ne crois pas ni à la bétise, ni à la naïveté de ceux qui l'ont écrit et réalisé. Au contraire, tout cela est très sophistiqué et maîtrisé, même si c'est très lourd.

Sur le même type de sujet, " le sacrifice des guerriers ", d'autres films ont été réalisés qui montrent que le sujet peut-être traîté de façon plus subtile. Le Alamo de John Wayne est beaucoup plus nuancé, et pourtant John Wayne n'était pas spécialement un militant gauchiste. Clint Eastwood, lui aussi traité de facho à une époque, vient de réaliser son " Lettres d'Iwo Jima" qui n'a rien à voir avec ce "300" mais qui montre qu'on peut avoir de l'empathie pour des combattants kamikazes tout en gardant une certaine distance.

Bref, ptet que je vieillis, ptet que je suis à côté de la plaque, mais il me semble qu'il y a un truc pas bien net dans ce 300, sous son couvert de divertissement décérébré.

Et pis mon honneur s'appelle fidélité, na :p (faut que je me calme, je vais me faire bannire par blogger si je continue comme ça...)
Anonyme a dit…
Au secours, il y a de la censure, mon message a été supprimé ! L'administrateur est un autocrate sanguinaire, je veux sortir !

Donc si je comprends bien, les Spartiates sont des frontistes. :-))

Mais que l'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit, les Spartiates ne sont pas d'extrème droite "en soi", pas d'anachronisme ou de relecture de l'histoire par des critères moraux actuels,

Ahnonmincedommage, ça sonnait bien.


de même que Jeanne d'Arc n'a jamais eu sa carte du Front National et pourrait aussi bien être un symbole féministe ou social.

Bof, c'est quand même un symbole nationaliste très fort : être canonisé pour avoir cassé de l'anglais (et Louis IX pour avoir cassé de l'arabe ou assimilé), c'est disons discutable selon les préceptes chrétiens.

En quoi la France est-elle une valeur morale ?


Les Perses sont montrés comme une bande de dégénérés corrompus, d'une autre civilisation, les "étrangers". Aucune noblesse dans leurs actes, ils sont lâches, fourbes, avachis dans les plaisirs.
Le personnage de Xerxes est un modèle de délire.


Pas besoin de nuance - puisqu'on vous dit que c'est de la bande dessinée !


C'est possible, mais est-ce qu'on est obligé de reprendre en 2007 les préventions des grecs contre cette civilisation qui leur échappait,

C'est un peu le problème en effet. :-) L'assyriologie a fait son apparition depuis.


Oui, c'est vrai, avec les homosexuels du côté des mauvais, les étrangers du côté des mauvais, les politiques du côté des mauvais.

Ah bon, c'est pas vrai ? Alors il faut que je revende ma carte du parti ?


Difforme donc traître.

Non dover, non poter altro che tradire.


et qui conclut que la liberté à un prix.

Autre version de l'adage : "on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs".

Surtout que les hommelettes et les hommeaux, à Sparte, sont très mal vus.


Le Alamo de John Wayne est beaucoup plus nuancé, et pourtant John Wayne n'était pas spécialement un militant gauchiste.

Hélas, la subtilité artistique des militants gauchistes s'est diluée avec le temps...


Merci pour le complément. :-) Je témoignerai en ta faveur pour ton ostracisme de Blogger.
Chevalier Bayard a dit…
Salut Nau ;)

Bon sur le film, vu qu'on l'a vu ensemble, qu'on en a discuté après et que j'ai parlé du malaise qu'il avait fait naître en moi, je vois qu'on est apparemment en phase.

Je voulais juste dire que je me suis autant régalé à la lecture de ton article qu'à celle des commentaires :D

"les hommelettes et les hommeaux, à Sparte, sont très mal vus. " ça je garde :D :D

... et je copie/colle dans mon commentaire en espérant que l'infâme censeur qui sévit dans le coin ne le verra pas ;)

Chev
Fanch a dit…
hé mais c'est plein de commentaires ici !

de même que Jeanne d'Arc n'a jamais eu sa carte du Front National et pourrait aussi bien être un symbole féministe ou social.

Bof, c'est quand même un symbole nationaliste très fort : être canonisé pour avoir cassé de l'anglais (et Louis IX pour avoir cassé de l'arabe ou assimilé), c'est disons discutable selon les préceptes chrétiens.

En quoi la France est-elle une valeur morale ?


Il me semble pourtant évident que Dieu voulait sauver le cassoulet de canard et le brochet au beurre blanc, menacés d'anéantissement par le boeuf bouilli à la menthe, enfin quoi.

Si ce n'est pas un combat moral, alors...

Difforme donc traître.

Non dover, non poter altro che tradire.


Grrrr... depuis hier soir je cherche de quel opéra cela peut être tiré. J'aurais dit Le Trouvère, mais enfin ça n'a pas l'air d'être ça...

Alors :

J'avéééé ahahaha ton bonheuuuuuuuur wwwouéééé maaaaa vie entièèèèèèèèèreux,
éhéhéhéhéhé c'est moouuAAAA quihihi teux livre au bourreau,
et c'est MOUAH, mouOUaahAAAAHAAAAHAAAAAHAHAHAHA
quihihi te lihihivre au bourroooôôÔÔÔÔÔÔÔÔôôôôôoooo...

(s'effondre sur scène terrassé d'émotion avant de ne pas chanter la suite de l'air)

Arf, il faudra quand même que je le fasse ce compte rendu de la Juive.
Anonyme a dit…
Salutations au maître de céans et au seigneur Bayard !

Gardez-vous bien des ciseaux !


Il me semble pourtant évident que Dieu voulait sauver le cassoulet de canard et le brochet au beurre blanc, menacés d'anéantissement par le boeuf bouilli à la menthe, enfin quoi.

Il est incontestable que cela est juste et bon, accordé !


Non dover, non poter altro che tradire.

Grrrr... depuis hier soir je cherche de quel opéra cela peut être tiré. J'aurais dit Le Trouvère, mais enfin ça n'a pas l'air d'être ça...


Allons, un être difforme... Tu n'es pas loin, c'est juste deux opéras avant : Rigoletto, I,2, dans "Pari siamo". Non dover, non poter altro che ridere.


J'avéééé ahahaha ton bonheuuuuuuuur

Je pense que c'est Merritt. J'ai bon ? Oui, l'ampleur du vibrato, pourquoi ?


On attend donc la Juive, telle que promise ! Trop tard, cochon qui s'en dédit.
Fanch a dit…
promis, en réalité j'espérais aller revoir La Juive avec le plateau alternatif Schicoff/ Furlanetto mais je me suis loupé.

Je n'ai donc entendu que Merrit - et je crois que je reproduis bien son vibrato oui :)

A propos de promesses non tenues (à part tous les topics pour le forum de Chevalier Bayard mais il ne fait plus attention alors heu...) j'ai du mal à trouver du Takemitsu à la guitare hormis le John Williams et le Goran Söllscher avec Patrick Gallois. Ca ne court ni les disquaires ni les médiathèques.

Je crois qu'il faudra adopter une startégie différente, guetter sur le long terme et sauter sur tout ce qui passe.
Chevalier Bayard a dit…
Si si ...je fais gaffe.

Articles les plus consultés